Bien-être animal non respecté, principes éthiques mis à mal, impact environnemental néfaste… Le cuir est sujet à controverse et débats sensibles. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus d’1 milliard d’animaux sont tués chaque année pour leur viande, dans des conditions souvent décriées, et leur peau est récupérée par l’industrie du cuir. Première concernée, l’industrie de la mode et des matériaux souples tente progressivement d’intégrer dans son utilisation du cuir les notions de bientraitance animale et d’éco-responsabilité.
Sommaire
1) Peut-on produire du cuir animal de façon éthique ?
Si les élevages intensifs de bovins sont limités en France - contrairement à certains autres pays – les pratiques allant à l’encontre du bien-être animal demeurent : absence d’abattoirs de proximité, conditions de vie, etc. Produire du cuir sans souffrance animale peut apparaitre de ce fait quasiment impossible tant que les élevages industriels ne changeront pas leur procédé et que la traçabilité du cuir ne sera pas renforcée. Par ailleurs, pour certains, tuer un animal engendre nécessairement de la souffrance, quand bien même l’animal a été élevé dans des conditions convenables.
Au-delà de l’éthique animale, l’impact de la production de cuir sur l’environnement est également problématique (recours aux produits chimiques lors du tannage, etc.).
Pour autant, renoncer au cuir pour améliorer le bien-être animal n’est pas forcément la solution adéquate. En effet, cela pourrait affecter la rentabilité des petits élevages et favoriser les élevages industriels.
Pour parvenir à une production de cuir plus éthique, la solution pourrait être d’optimiser le système de traçabilité du cuir afin que les professionnels de l’industrie textile puissent choisir des peaux provenant d’élevage de qualité. Aussi, le développement de petites fermes vertueuses, plaçant le bien-être animal au cœur de leurs actions, pourrait contribuer à une production de cuir plus responsable.
A titre d’exemple, la startup française Cérès - récompensée par le label France Initiative Remarquable - propose des accessoires en cuir 100 % français, provenant de bovins « nés et élevés dans des fermes de la Mayenne, de la Sarthe et de l’Orne, passant au moins six mois de l’année dans les pâturages » ; en respectant les règles de la bientraitance animale.
2) Cuir et traitement des animaux : quelle réglementation ?
La réglementation française et européenne au sujet de la protection animale est l’une des plus avancées au monde.
Comme le souligne le président du Conseil National du Cuir, Franck Boehly : « plus de 15 000 opérations de contrôle sont réalisées tous les ans par les services de l’Etat ». Par ailleurs, afin d’améliorer les conditions des animaux (en les vaccinant contre la teigne par exemple) et par conséquent, obtenir un cuir de meilleure qualité, la filière du cuir a déboursé 19 millions d’euros.
Les procédures d’abattage sont régies par les cinq droits fondamentaux des animaux définis par l’Organisation Mondiale de la Santé Animale :
- l’absence de douleur, de lésions et de maladie .
- le confort physique et thermique ;
- l’absence de faim, de soif et de malnutrition ;
- la possibilité d’exprimer des comportements normaux propres à chaque espèce ;
- l’absence de stress.
Cette réglementation en faveur de la protection animale revêt deux enjeux :
- un enjeu qualitatif, dans la mesure où un animal bien traité et en bonne santé donnera une peau de meilleure qualité.
- un enjeu d’ordre sociétal, dans la mesure où la bientraitance animale constitue une préoccupation croissante pour les citoyens et les professionnels de l’industrie textile.
Toutefois dans les faits, cette réglementation n’est pas toujours respectée. Afin de réduire les mauvaises pratiques, l’État effectue plus de 15 000 contrôles par an.
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C’est une question qui agite beaucoup les marques éco-responsables aujourd’hui : une chaussure en cuir peut-elle faire bon ménage avec une démarche éthique ? Il nous a semblé important de partager nos connaissances et nos réflexions. Nous espérons que cela vous aidera à vous forger votre propre opinion.
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2) Maîtriser la qualité du cuir pour s’assurer de la bientraitance animale ?
C’est un fait : la qualité d’un cuir est liée aux conditions de vie des animaux. Dans l’industrie de la mode, le cuir utilisé est issu à 90 % de vaches. Le cuir de mouton et de chèvre est également utilisé, dans une moindre mesure. Plus rare, le cuir de kangourou est apprécié pour sa robustesse. Dans tous les cas, mieux l’animal est traité, plus sa peau sera de qualité.
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Mais comment savoir si les droits et les conditions des animaux sont respectés ? En réalité, seule une traçabilité précise du cuir peut permettre de connaître la provenance des peaux, et par conséquent de s’assurer de la conformité de l’élevage.
A savoir que les petits élevages locaux en circuit court sont considérés comme plus éco-responsables en raison de leur plus grande transparence. De même, les élevages biologiques sont plus pointilleux sur le bien-être animal que les élevages industriels (nombre d’animaux limités dans une zone dédiée, etc.).
Cependant, compte tenu du fait que la traçabilité du cuir est difficile à déterminer, les informations sur les conditions d’élevage et d’abattage des animaux demeurent souvent floues pour les consommateurs et les professionnels du cuir qui souhaitent en outre améliorer la qualité des peaux.
3) Des alternatives au cuir animal ?
Si renoncer au cuir animal semble difficile en raison des conséquences financières que cela provoquerait, des solutions plus éthiques émergent doucement. Plus écologique, le cuir éthique végétal permet en effet de produire un matériau ressemblant au cuir, fabriqué à base de végétaux, déchets organiques, etc. Attention toutefois, ces termes - “cuir végan”, “cuir végétal” - couramment utilisés, n’existent pas : le cuir étant par définition la peau d’un animal.
Il existe de nombreuses alternatives au cuir, à base, notamment, de cactus (conçu par l’entreprise Desserto), d’eucalyptus, de champignon (Muskin), de liège, de déchets de pomme (appleskin), de raisin, d'ananas (piñatex)... Nous pouvons également citer le faux cuir ou le simili-cuir fabriqués à partir de pétrole.
Toutefois, malgré son intérêt écologique et éthique indéniable, le “cuir durable” nécessite un processus de fabrication beaucoup plus onéreux et long que le cuir animal.
Certaines marques françaises tentent malgré tout de percer dans le secteur de niche du “cuir responsable” : c’est le cas notamment de la marque de chaussures Veja, qui propose des modèles ne contenant aucun produit d’origine animale, fabriqués dans une matière écologique ressemblant au cuir, à base de déchets de maïs issus de l’industrie alimentaire.
Ainsi, l’enjeu pour la filière cuir pourrait être d’un côté de renforcer la traçabilité du cuir afin de pouvoir choisir une peau de qualité produite dans un élevage respectant la bientraitance animale ; et de l’autre, démocratiser le “cuir végétal” en optimisant ses propriétés.
https://blutopia.org/cuir-eco-responsable/
Cuir vegan ou cuir végétal : Enfin 8 alternatives au cuir
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