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Traçabilité des matières : où en est la réglementation ?
Crédits: ©Freepik

Traçabilité des matières : où en est la réglementation ?

Alice Chevallier
par Alice Chevallier - Modifié Il y a 1 an
Traçabilité des matières : où en est la réglementation ?
Crédits: ©Freepik

Doucement, mais sûrement, la traçabilité des matières commence à percer dans le secteur du textile et de la mode. Alors que certaines mesures se mettent progressivement en place, d’autres peinent à s’imposer et/ou à entrer en vigueur. Remise en question, coopération ou ignorance de la législation : les entreprises et marques de prêt-à-porter accueillent de manière différente ces nouvelles normes et obligations. Qu’en est-il exactement de la réglementation actuelle ?


1) Loi AGEC : la transparence lors de l’achat

La loi AGEC, ou loi « anti-gaspillage pour une économie circulaire » vise à informer les clients et les consommateurs sur les caractéristiques environnementales des textiles et vêtements dont ils font l’acquisition. Cette loi concerne tout type d’entreprise. En revanche, d’après l’Union des Industries Textiles, son entrée en vigueur dépend de la structure de l’entreprise. Aussi, depuis le 1er janvier 2023, ce sont les « grosses entreprises » générant plus de 50 millions de chiffre d’affaires qui sont concernées. Les entreprises de taille moyenne devront s’y soumettre dès le 1er janvier 2024 et les « petites » structures le 1er janvier 2025. Si des marques comme Kiabi, Zara, C&A ou Gémo jouent le jeu et ont mis à disposition l’intégralité de leurs fiches-produits, d'autres sont un peu plus à la traîne.


Concrètement, dès lors qu’ils sont concernés, les professionnels de la filière textile et de la mode en France doivent divulguer aux consommateurs des éléments clés, en rapport avec l’éco-responsabilité. Ces informations doivent être accessibles durant l’achat via des liens ou flashcodes inscrits sur les étiquettes et renvoyant vers une fiche-produit. Sur cette dernière, doivent être mentionnés :

  • la traçabilité géographique (des 3 étapes : tissage/tricotage, teinte/impression et confection),
  • la quantité de matériaux recyclés,
  • la recyclabilité,
  • la présence de microfibres plastiques
  • la présence de matières dangereuses.

Devront également être mentionnés les bonus ou malus obtenus par l’entreprise pour la récompenser ou la pénaliser sur ses qualités environnementales (mesure en cours de négociation).


Par ailleurs, la loi AGEC devait instaurer un nouveau dispositif en 2023 : le plan de Prévention et d’éco-conception, que devront fournir les entreprises de la filière textile tous les 3 ans. Pour autant, ce règlement n’est toujours pas d’actualité et aucune date d’entrée en vigueur précise n’a été fixée.


2) Calculer la qualité environnementale des textiles avec l’Eco-score

À l’instar des produits alimentaires et cosmétiques soumis à des évaluations accessibles depuis des applications mobiles, c’est au tour des textiles et vêtements d’être notés selon plusieurs critères afin de rendre public leur impact écologique. Ce dispositif, appelé Eco-score, mis en place dans le cadre de la loi Climat & Résilience, devait s’appliquer le 1er janvier 2023. Cependant, il n’a toujours pas été officiellement déployé. Des phases test sont toujours en cours. L’Eco-score devrait être obligatoire pour les entreprises de l’habillement d’ici fin 2023, voire courant 2024. Malgré tout, certaines marques de prêt-à-porter ont déjà adopté l’affichage environnemental en vigueur, comme Lagoped (première entreprise textile au monde à avoir mis à disposition l’éco-score de tous ses produits), Décathlon, Okaïdi, Tissage de Charlieu ou encore Bonobo. Mais cet Eco score ne fait pas l’unanimité parmi les experts du secteur. Certains lui reprochent en effet de ne pas suffisamment intégrer la notion de durabilité et de biodiversité, intimement liée à la préservation de l’environnement, et de ne pas être suffisamment précis (catégories produits trop génériques). Notons que cet affichage environnemental peut prendre une forme dématérialisée, et indiquera différents éléments comme la traçabilité des textiles et le pourcentage de matières éco-responsables, les labels, le picto Triman et l’empreinte environnementale.


3) Loi REACH : Attention, toxique !

Le 30 janvier 2023, un rapport établi par la chercheuse Audrey Millet (« Le Livre Noir de la Mode ») a été rendu public. Celui-ci a notamment dévoilé la présence de nombreux produits toxiques dans les vêtements européens (acide perfluorooctanoïque et composé perfluoré entre autres), nocifs aussi bien pour la santé que pour l’environnement. Pourtant, la loi REACH, entrée en vigueur en 2007, interdit l’utilisation de certains produits chimiques pour les vêtements destinés au marché européen. Mais dans les faits, lors des importations, les contrôles effectués par les douanes sont loin d’être optimaux. Résultat : les vêtements importés peuvent contenir des substances nocives pour la santé, qui polluent l’eau lors du lavage en machine. Et les risques (cancer, contaminations in-utérines et dans le lait maternel, problèmes cardiaques…) pèsent aussi bien sur les travailleurs que sur les porteurs de ces vêtements « toxiques ». Ce dispositif montre ainsi ses limites quand il s’agit d’importations puisque des pays comme la Chine, le Maroc, l’Inde, le Vietnam ou encore le Cambodge, n’ont bien souvent jamais entendu parler de la loi REACH.


Une enquête a pointé du doigt la présence de substances dangereuses chez des marques de mode mondialement connues comme Nike, Limited Brands, SheIn ou encore Adidas. Si certaines marques de prêt-à-porter ont à cœur d’éliminer ces produits toxiques de leurs productions - comme Adidas - d’autres font la sourde oreille.


L’enjeu pour le gouvernement est de durcir cette loi, avec notamment l’ajout de produits toxiques interdits, une plus grande transparence pour les consommateurs, des clauses destinées aux fournisseurs étrangers afin qu’ils respectent les normes de l’Union Européenne ou encore la mise en place d’obligations spécifiques pour le secteur de l’habillement. Mais pour l’heure, la révision de la loi REACH n’est pas d’actualité puisqu’elle a été repoussée à la fin de l’année 2023.




4) Greenwashing ou quand l’écologie devient un argument marketing… trompeur

L’éco-responsabilité et la préservation de la planète sont plus que jamais au cœur de nos priorités. Les clients et les consommateurs privilégient de plus en plus les marques « green » et eco-friendly. Certaines enseignes de prêt-à-porter l’ont bien compris et surfent sur ces nouvelles habitudes en mettant en avant des arguments écologiques mensongers pour attirer les clients et multiplier les ventes. Il s’agit en fait de Greenwashing, une pratique commerciale trompeuse punie par la loi.


Aussi, le Code de l’environnement a listé plusieurs termes écologiques pouvant s’avérer mensongers : les termes « neutre en carbone », « biodégradable » et « respectueux de l’environnement » et toute mention équivalente sur les emballages, produits et publicités sont désormais interdits pour les entreprises en France depuis le 1er janvier 2023, sauf preuve crédible à l’appui. Leur utilisation est passible d’une amende de 100 000 euros pour les entreprises.

Si certains professionnels de l’industrie textile reprochent à cette mesure de lutte contre l’éco-blanchiment d’être trop stricte, d’autres la trouvent au contraire trop laxiste. Il faut dire que le Greenwashing est présent dans tout type d’entreprise de la filière textile : des marques comme Adidas ou encore New Balance ont même été accusées de publicités mensongères.


5) Nouvelle loi sur le devoir de diligence des entreprises

Le 1er juin 2023, le Parlement Européen a adopté une nouvelle loi visant à rendre les multinationales responsables des destructions de l’environnement et des violations des droits humains sur leur chaîne de production. Cela concerne principalement le travail des enfants, la pollution, l’esclavage, l’exploitation par le travail et la dégradation environnementale.


En cas de non-respect des règles, des sanctions pourraient être prises : une amende équivalente à 5% minimum du chiffre d’affaires net mondial et une exclusion des marchés publics pour les entreprises des pays tiers.


Malgré la réglementation textile en vigueur en faveur de l’écologie, bon nombre de metteurs sur le marché, producteurs et autres professionnels et experts du secteur textile réclament un renforcement des règles liées à la traçabilité textile afin de faire face au fléau du Greenwashing et entreprendre une vraie transition écologique. À suivre.




Sources d’inspirations

Générations futures :
Alice Chevallier
Rédigé par Alice Chevallier
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Designer
Designer prototypiste. Spécialisée dans la conception de dispositifs et équipements en textiles techniques et matériaux souples dédiés aux activités et sports de plein air, au transport et protection d'équipements. En veille sur les matériaux innovants, les nouvelles technologies.

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